Vendredi 4 Octobre 1996, 21 Heures.

Un bus grand tourisme, quelque part à AIRE SUR LA LYS, qui attend, tous feux allumés, moteur ronflant, portes ouvertes. Beaucoup d'agitation tout autour. Des voyageurs venus de différentes villes du Nord Pas de Calais, tous différents, mais ayant un point commun : le partage d'une même passion, celle du CHIEN et de l'AGILITY.

Une autre raison de se retrouver ce soir-là. Rassembler toute leur énergie, leur motivation, ne former qu'un seul bloc pour aller encourager LEUR équipe de France au premier Championnat du Monde d'agility en Suisse à MORGES.

Un voyage assez long et fatiguant, plus de 10 heures... Enfin qui aurait pu être plus long sans cette chaude ambiance propre aux supporters, partage du pique nique, échange de remontants divers, bien dosés, karaoké pour préparer la voix, chants accompagnés à la guitare, tous les ingrédients étaient réunis pour rompre la monotonie de 10 heures d'autocar.

Enfin passage à la douane. Nous sommes presque parvenus à destination. Dos, fessiers et articulations endoloris vont enfin pouvoir se déplier. Au détour d'un virage quelques flèches qui indiquent tout simplement " Championnat du Monde d'Agility". Cette fois, nous y sommes, ce n'est plus un projet ébauché au lendemain de Vichy, mais une réalité.

Descente du bus dans la brume et dans un petit matin plutôt frisquet. Les drapeaux tricolores sont dépliés, petit passage devant le caméscope; Il faut bien immortaliser l'instant.

Atmosphère extérieure plutôt froide. Et voilà qui ne va pas arranger les choses, puisque nous entrons dans une... patinoire. Heureusement que dans nos cœurs il y a assez de chaleur pour faire fondre la mer de glace. Pas une seule chute d'énergie ou de dynamisme malgré une nuit sans sommeil. NOUS SOMMES PRETS.

Peu à peu, les gradins se remplissent de supporters de tous pays que nous cherchons à identifier. Préparons-nous à remporter la coupe des meilleurs supporters. Une grande concurrence se dessine face à nous, ils sont tout d'orange vêtu, les HOLLANDAIS bien sûr, les mécaniques oranges comme disent nos amis footballeurs. Un autre trophée se jouerait-il dans les tribunes ? A nous de le gagner.

Les festivités démarrent enfin.

Beaucoup de solennité dans un premier temps la présentation des équipes se fait par pays avec un charmant côté "Jeux Olympiques". Applaudissements pour chaque équipe à égalité semble-t-il... jusqu'à l'arrivée de l'équipe de France. Standing ovation, trompettes, cris, applaudissements, mouvements de drapeaux... tout y est. Il faut bien qu'ils nous remarquent nos petits représentant français, qu'ils sachent que cette année ils ne sont pas seuls, que toute notre énergie les accompagne.

A moins d'être sourds, ils ont du nous entendre...

Encore une fois, grande concurrence de l'équipe hollandaise.

Les supporters des autres pays, bien que moins nombreux, ne sont pas en reste. Eux aussi semblent bien décidés à soutenir leur équipe. Un enthousiasme bien communicatif en tout cas. Quelques équipes sont sans supporters, normal venant des U.S.A, du Japon ou de la Russie. Qu'importe ils méritent eux aussi des encouragements et cette fois de la part de tout le public, toutes nations confondues.

Pas trop le temps de réfléchir, les épreuves commencent. Dans les gradins, toujours la même ambiance chaleureuse mais cette fois plus concentrée. Avec admiration, nous suivons l'évolution des équipes. Mini ou standard, ce championnat est d'un excellent niveau. Nous retrouvons là le véritable spectacle que devrait toujours être l'agility. Spectacle et compétition à la fois, quel superbe mariage.

Le silence respectueux qui accompagne le passage de chaque couple maître-chien contraste agréablement avec l'explosion bruyante des applaudissements et encouragements qui s'intercalent systématiquement et ceci qu'elle que soit la nationalité de l'équipe en jeu. Même respect, même admiration. Chaque belle prestation est récompensée de la même façon. Un petit privilège, cependant, pour les équipes venues de loin sans supporters. Normal, le public a parfaitement compensé ce manque.

Arrive l'équipe de France. A l'admiration et l'euphorie viennent s'ajouter une profonde émotion et une forte tension. Ce ne sont plus de simples encouragements. Nous sommes sur le parcours. C'est l'énergie du groupe tout entier qui entre en symbiose avec le couple français maître-chien en action. Tonnerre d'applaudissements à s'écorcher les mains. Cris de joie à s'arracher les cordes vocales. A l'issue de cette première journée notre mission de supporter est accomplie.

L'équipe de France est en tête du classement.

Nous avons l'intention de fêter cette première partie, mais le sommeil et la voix de la sagesse ont raison de nous. Nous devons être en forme pour le lendemain matin.

Et l'on peut dire qu'il fut réparateur ce sommeil. Il faut la voir arriver au matin du second jour, la glorieuse équipe de supporters français. Une entrée remarquée dans la patinoire, drapeaux en tête, chants de victoire et d'encouragements. Un leitmotiv "on vient, on gagne et on s'en va" scandé avec une puissance parfois insolente restera à jamais dans nos mémoires. Plus d'une fois il sera j'en suis persuadé repris dans nos concours régionaux avec un petit pincement au cœur et la tête pleine de souvenirs.

Mais en ce matin du dimanche 6 Octobre 1996 c'est dans les gradins de la patinoire que se prépare une autre image forte de ce championnat du Monde d'agility. Voici que les supporters FRANCAIS, drapeaux en tête s'en vont rendre visite aux supporters hollandais. S'en suit un superbe concert, commun, même air, parole différentes, mélange de drapeaux. Moment fort et inoubliable où pendant quelques longues minutes une véritable osmose de deux équipes que d'autres appelleraient rivales qui glorifient ensemble une même passion l'Agility.

Le début des épreuves appelle un peu de calme. On retrouve le même silence respectueux que la veille lors du passage de chaque équipe. Une tension grandissante mais pas la moindre défaillance au niveau de l'énergie déployée. Seules les voix commencent à se casser un peu. L'équipe de France victorieuse la veille doit passer en dernier. Le suspens est bien entretenu par les organisateurs.

Indescriptible la tension; l'émotion et le silence qui accompagnent le passage de l'équipe de France. Pression soigneusement accentuée par le speaker annonçant "et c'est le titre qui est en jeu" à l'occasion du passage du dernier couple français maître-chien. Un mélange de gorges serrées, de larmes de joies contenue, de pression et d'une énergie qui ne demandent qu'a se libérer...

L'occasion nous est enfin donnée d'exploser dès le franchissement du dernier obstacle. Parcours réussi ! C'est la victoire de l'équipe de France à ce premier Championnat du Monde d'agility.

Indescriptible aussi à ce moment, la joie des supporters français accompagnés des hollandais qui quittent la tribune pour aller rejoindre les concurrents sur le terrain. Et c'est au son de "macarena" que concurrents et supporters rejoints par les italiens et les espagnols respectivement second et troisième s'embrassent et se congratulent. Concurrents français et entraîneur se voient hissés sur des épaules de supporters déchaînés reprenant dans une folle ambiance tous les slogans scandés et chantés au cours de ces deux jours.

Retour au calme pour la cérémonie officielle de remise des récompenses. Là encore félicitations aux organisateurs. Moins officielle, mais tout aussi symbolique, dans les gradins, la cérémonie d'échange de casquettes, de tee-shirt, de drapeaux avec nos collègues hollandais.

La réflexion de la veille revient en mémoire. Dans quel sport peut-on trouver des supporters aussi motivés, aussi investis, mais également aussi respectueux de l'ensemble des concurrents, même s'ils sont qualifiés d'adversaires ? Réponse à méditer. ET SI C'ETAIT TOUT SIMPLEMENT LE CONTACT DES CHIENS QUI NOUS RENDAIT PLUS HUMAINS ?

Passée cette euphorie tellement difficile à reproduire et à faire partager par le biais d'un stylo, alors à tous celles et ceux qui souhaitent vivre cet événement rendez-vous l'année prochaine au DANEMARK avec la même envie de gagner.

DES SUPPORTERS HEUREUX.